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10 nov. 2011

LES GIROUETTES DU MANAGEMENT ET DE L’EXPERTISE

Le zapping ne conduit pas à la constance
Pris dans un mouvement brownien et une course entre les plateaux de télévision, ou les conférences, les experts n’ont plus le temps de réfléchir. Dans mon livre, les Mers de l’incertitude, je relatais l’anecdote réelle suivante :
« Dernièrement, un journaliste vedette a déclaré à la radio : « Entre mon rôle de rédacteur en chef de mon journal et d’éditorialiste, plus toutes les émissions auxquelles je participe, c’est bien simple, je n’ai plus cinq minutes de libre pour m’arrêter ». Il disait cela comme la preuve de sa performance et de son importance. Son interlocuteur en sembla d’ailleurs impressionné. En moi-même, je pensais : « Mais quand réfléchit-il ? Comment peut-il vraiment faire son métier d’éditorialiste et de journaliste en courant tout le temps de la sorte ? ». »
Ils deviennent alors des perroquets, reprenant la dernière histoire racontée, et, si jamais le vent en vient à tourner, dociles girouettes, ils tourneront tous ensemble, tout en expliquant doctement pourquoi tout a changé.
Dans le même temps, les dirigeants sont eux aussi pris dans le ballet des avions, des réunions, et parfois aussi des plateaux de télévision. Comme, souvent, ils n’ont pas grandi dans l’entreprise qu’ils dirigent et viennent de la rejoindre, ils ne la connaissent pas de l’intérieur, et ne manipulent que des rapports et des tableaux de chiffres.
Difficile dans ce contexte de se fixer sa propre conviction, surtout si l’environnement est mouvant. Aussi feuilletant les pseudo-analyses des experts-girouettes, reproduisant sans s’en rendre compte les lieux communs produits par l’organisation qu’ils viennent de rejoindre, ils en viennent à affirmer le contraire de ce qu’il avait dit dans une responsabilité précédente.
Ainsi va le monde…

12 juil. 2011

IL EST NORMAL DE NE PAS ÊTRE D’ACCORD

Pourquoi penser qu’il n’y a qu’une interprétation possible ?
« Il y a quelque chose qui m’échappe : j’ai beau expliquer rationnellement à mes équipes, on ne se comprend pas et rien ne se passe », me disait dernièrement la responsable de la fabrication d’une usine.
La trentaine, c’était son premier poste de management après deux postes techniques en usine.
« Par rationnellement, vous entendez quoi, lui répondis-je ? »
Elle marqua un blanc et me dit :
« Eh bien, que j’ai passé du temps à analyser à fond le problème, à envisager les différentes hypothèses et à construire la meilleure solution.
- Vous pensez vraiment que, pour un problème complexe, il n’y a qu’une solution possible ? Je comprends bien que 1+1 égale toujours 2, mais la vie est rarement aussi simple. Donc s’ils ne comprennent pas, c’est peut-être qu’ils ne font pas la même analyse. Moi, voyez-vous, c’est quand les gens sont spontanément d’accord avec moi que je suis inquiet : j’ai l’impression qu’on est en train de passer à côté de quelque chose. »
Je m’arrêtai un instant, puis poursuivis :
« Donc, j’ai tendance à vous retourner votre question : comment pouvez-vous trouver normal qu’après une seule explication « rationnelle » vos équipes adhèrent à ce que vous leur demandez ? Pourquoi voulez-vous éviter une confrontation ? Pourquoi, au contraire, ne la recherchez-vous pas ? Doutez-vous de la solidité de votre raisonnement ? Craignez-vous qu’une confrontation débouche sur un conflit ? »

10 juin 2011

COMMENT MATÉRIALISER L’ÉCART ENTRE CE QUE PENSENT LES CLIENTS ET CE QUE L'ENTREPRISE CROIT QU'ILS PENSENT ?

Le Miroir Client un outil simple pour matérialiser les écarts entre entreprise et client

- Je publie à nouveau, cette fois en une seule fois pour faciliter la lecture, les 4 articles parus cette semaine et relatif au Miroir Client -

Lors de mes derniers articles, j’ai insisté sur la difficulté de l’observation, et notamment du risque de voir l’entreprise développer un point de vue différent de celui du client (1), risque qui, paradoxalement, peut croître avec l’expertise interne de l’entreprise.
Comment peut-on agir ? Y a-t-il un outil simple dont toute entreprise pourrait se doter ?
La réponse que j’ai développée et  qui a été déjà mise en œuvre de multiples fois, et dans de grandes organisations, est le Miroir Client.
Avant de vous présenter de quoi il s’agit, je précise que cet outil n’a pas la prétention de résoudre à lui seul la totalité du problème posé, mais il a montré qu’il était un excellent déclencheur et permettait des progrès significatifs.
L’idée Miroir Client est née de la remarque suivante : ce qui détermine les actions de chacun, ce ne sont pas les priorités clients réelles, mais les priorités clients telles que vues et interprétées par l’organisation et son personnel ; s’il y a un décalage entre ce qu’attend le client et ce que croit l’entreprise qu’il attend, le centrage des actions sera inefficace. Il y a donc un intérêt à mettre en regard, comme par un effet miroir, ce que l’entreprise croit que le client pense et ce qu’il pense vraiment.
Quel est le principe du Miroir Client ? Il est de mettre en relief les décalages éventuels entre ce que pensent les clients et ce que l’entreprise croit que les clients pensent. 
Comment ?
  • Par l’élaboration d’un questionnaire partant du parcours client et, pour chaque item, demandant quel est son importance et quel est le degré de satisfaction,
  • Par l’administration de ce questionnaire d’abord à l’ensemble du personnel de l’entreprise (ou à un échantillon si l’entreprise est de grande taille), puis à un échantillon des clients. Au personnel, on demande d’indiquer non pas son opinion personnelle face à une question donnée, mais ce qu’il pense que sera la réponse du client.
  • Par, ensuite, la mise en forme des résultats sous forme très visuelle matérialisant les écarts ou les similitudes (voir la photo ci-jointe)
  • Par l’animation de la restitution, amenant des représentants de l’entreprise à auto-analyser les tableaux, et en veillant qu’ils n’esquivent pas les problèmes.
Est-ce que cela marche vraiment ? La réponse est oui ….

Il peut être rapidement mis en œuvre par l’entreprise elle-même, et être déployé partout
Une fois passée la phase initiale de mise au point du questionnaire et de la mise en forme des résultats, et de la formation d’une équipe interne, la démarche Miroir Client peut être réalisée sans l’appui de ressources externes, dans toutes les composantes de l’entreprise.
… et c’est donc un outil d’autodiagnostic décentralisé
Le questionnaire étant administré localement, chaque équipe – il ne faut en aucun cas en faire un outil d’évaluation individuelle – est mise face à la situation telle qu’elle est pour elle, et non pas de la moyenne de l’entreprise. L’expérience montre qu’il est alors – sauf de rares exceptions –, inutile d’argumenter longuement sur les actions à entreprendre. La seule matérialisation des écarts entre ce que l’équipe pensait et ce que le client pensait vraiment va déclencher un changement des comportements.
C’est une démarche consolidante…
Pour la plupart des items, l’écart entre les points de vue est faible. En effet, si ce n’était pas le cas, l’entreprise serait complètement décalée par rapport aux attentes du client, et serait donc déjà sortie de son marché(2). Ce fait, à chaque démontré, qu’à environ 80/90%, il y a adéquation favorise l’adhésion à la démarche et consolide les équipes.
… qui permet d’optimiser les efforts et les allocations de ressources
Le Miroir Client met en relief à la fois les cas où l’entreprise sous-investit sur un sujet (soit en sous-estimant l’importance de l’item, soit en surestimant la satisfaction du client, soit cas le pire, les deux à la fois) ou surinvestit (pour des raisons symétriques). Comme le Miroir Client est déployé localement, cette optimisation est fine et précise, et n’est pas imposée par le centre, ni par des visions moyennes.
Les illustrations de cet article sont tirées de cas réels (3).
Cette démarche peut être réalisée pour toute entreprise, quel que soit son domaine d’activités, grand public ou industriel. Le questionnaire est simplement évidemment très différent, et son mode d’administration aussi. Notamment en milieu industriel, comme le client est lui-même une entreprise, et donc une organisation complexe, il faut chercher à administrer le questionnaire à l’intérieur de l’organisation du client.

Voici deux exemples réels, issus d’une compagnie aérienne, entreprise dans lequel le Miroir Client a été intégré pendant de nombreuses années, comme un outil permanent d’une démarche qualité.
Pour la séquence à l’intérieur de l’aéroport, une divergence insolite a été le suivante : le personnel de l’entreprise était persuadé que les clients n’étaient pas satisfaits des toilettes de l’aéroport, alors que les clients pas du tout. Lors de la restitution de ce point, il était apparu que c’était en fait un problème de conditions de travail pour le personnel au sol …
Moins anecdotique, cette fois, il y avait un décalage important et plus complexe concernant le moment où, les passagers étant montés, l’avion est immobilisé sur la piste en attente du décollage. Ce temps d’attente était une source de mécontentement important pour les clients, mais uniquement ceux en classe économique, ce sans que le personnel n’en soit conscient.
Ces décalages ont permis de mettre en évidence que :
  • Les clients affaire ou première étaient occupés dès leur montée dans l’avion (journaux, proposition d’une boisson), et, étant des voyageurs fréquents, ils avaient l’habitude de ces temps d’attente, et n’étaient donc pas stressés.
  • A l’inverse, les clients en classe économique n’avaient rien à faire (une fois assis à leur place, personne ne s’occupait d’eux). De plus, bon nombre n’ayant pas l’habitude de voyager et ne connaissant pas les problèmes de régulation au niveau d’un aéroport, craignaient que, si le temps d’attente se prolongeait,  cela voulait dire qu’un problème était apparu sur l’avion. D’où stress.
  • Le personnel était lui très occupé pendant cette phase-là : il devait vérifier le remplissage de l’avion, contrôler les fermetures des casiers à bagages, procéder à des séries d’actions liées à la sécurité. Pour lui, ce temps d’attente était d’abord un temps de travail. Par ailleurs, étant bien évidemment des voyageurs fréquents, ils avaient l’habitude de ces temps d’attente.
La mise en évidence de ces décalages a conduit la compagnie aérienne à faire évoluer la séquence des services pour la classe économique et à modifier l’attitude du personnel de bord pour les rendre plus attentifs aux préoccupations réelles des passagers.

Deux exemples enfin issus d'une entreprise industrielle.

Pour cette entreprise du secteur de la chimie, le Miroir Client avait montré un décalage sur le thème « meilleur fournisseur ». Or le personnel de l’entreprise avait une connaissance précise de sa concurrence et une vue exacte de la qualité relative de ces prestations.
Que s’était-il passé ?
Pour les clients, la performance de l’entreprise n’était pas comparée à ses concurrents - souvent elle était le fournisseur unique pour ces produits -, mais à tous les fournisseurs que voyait la structure d’achat. Ainsi la même performance objective de l’entreprise donnait lieu à des interprétations pouvant être complètement différentes, puisque les référentiels n’étaient pas du tout les mêmes : l’entreprise experte de son secteur se comparaît à ses concurrents, ses clients experts de leur métier comparaient l’entreprise en dehors de son secteur. Divergence des repères et des histoires qui conduit à une divergence des interprétations.
Autre exemple issu de la même entreprise et concernant un de ses produits de cette entreprise industrielle qui était extrêmement dangereux à manipuler. L’ensemble du personnel avait intégré cette dimension dans son travail quotidien : la gestion de la sécurité ne posait plus de problèmes et était devenue « évidente » par apprentissage. À l’inverse, les clients, n’ayant pas la même expertise, restaient très inquiets de ces risques.
Lors de la réalisation du Miroir Client, le personnel de l’entreprise avait complètement sous-estimé l’importance de la problématique sécurité pour les clients, alors qu’elle était ressorti comme prioritaire pour ces derniers.
La réalisation du diagnostic avait été pour l’entreprise l’occasion de cette découverte. L’action à déployer avait été très simple, car il suffisait d’utiliser toute l’expertise interne pour mettre au point des documents pour les clients. En parallèle, les commerciaux ont intégré la dimension sécurité dans toutes leurs discussions commerciales.



(2) Dans une telle situation, une démarche de type Miroir Client est inappropriée. L’entreprise a besoin de se reconstruire en profondeur.
(3) Si vous cliquez dessus vous aurez l’image agrandie et donc plus lisible


9 juin 2011

ON NE VOIT PLUS CE QUE L’ON FAIT TOUS LES JOURS… LES CLIENTS, OUI !

Le Miroir Client, un outil simple pour matérialiser les écarts entre entreprise et client (4)
Pour cette entreprise industrielle, du secteur de la chimie, le Miroir Client avait montré un décalage sur le thème « meilleur fournisseur ». Or le personnel de l’entreprise avait une connaissance précise de sa concurrence et une vue exacte de la qualité relative de ces prestations.
Que s’était-il passé ?
Pour les clients, la performance de l’entreprise n’était pas comparée à ses concurrents - souvent elle était le fournisseur unique pour ces produits -, mais à tous les fournisseurs que voyait la structure d’achat. Ainsi la même performance objective de l’entreprise donnait lieu à des interprétations pouvant être complètement différentes, puisque les référentiels n’étaient pas du tout les mêmes : l’entreprise experte de son secteur se comparaît à ses concurrents, ses clients experts de leur métier comparaient l’entreprise en dehors de son secteur. Divergence des repères et des histoires qui conduit à une divergence des interprétations.
Autre exemple issu de la même entreprise et concernant un de ses produits de cette entreprise industrielle qui était extrêmement dangereux à manipuler. L’ensemble du personnel avait intégré cette dimension dans son travail quotidien : la gestion de la sécurité ne posait plus de problèmes et était devenue « évidente » par apprentissage. À l’inverse, les clients, n’ayant pas la même expertise, restaient très inquiets de ces risques.
Lors de la réalisation du Miroir Client, le personnel de l’entreprise avait complètement sous-estimé l’importance de la problématique sécurité pour les clients, alors qu’elle était ressorti comme prioritaire pour ces derniers.
La réalisation du diagnostic avait été pour l’entreprise l’occasion de cette découverte. L’action à déployer avait été très simple, car il suffisait d’utiliser toute l’expertise interne pour mettre au point des documents pour les clients. En parallèle, les commerciaux ont intégré la dimension sécurité dans toutes leurs discussions commerciales.

8 juin 2011

ASSIS DANS LE MÊME AVION, PEUT-ON ATTENDRE PLUS LONGTEMPS QUE LES AUTRES ?

Le Miroir Client, un outil simple pour matérialiser les écarts entre entreprise et client (3)
Je poursuis la présentation du Miroir Client avec deux exemples réels, issus d’une compagnie aérienne, entreprise dans lequel le Miroir Client a été intégré pendant de nombreuses années, comme un outil permanent d’une démarche qualité.
Pour la séquence à l’intérieur de l’aéroport, une divergence insolite a été le suivante : le personnel de l’entreprise était persuadé que les clients n’étaient pas satisfaits des toilettes de l’aéroport, alors que les clients pas du tout. Lors de la restitution de ce point, il était apparu que c’était en fait un problème de conditions de travail pour le personnel au sol …
Moins anecdotique, cette fois, il y avait un décalage important et plus complexe concernant le moment où, les passagers étant montés, l’avion est immobilisé sur la piste en attente du décollage. Ce temps d’attente était une source de mécontentement important pour les clients, mais uniquement ceux en classe économique, ce sans que le personnel n’en soit conscient.
Ces décalages ont permis de mettre en évidence que :
  • Les clients affaire ou première étaient occupés dès leur montée dans l’avion (journaux, proposition d’une boisson), et, étant des voyageurs fréquents, ils avaient l’habitude de ces temps d’attente, et n’étaient donc pas stressés.
  • A l’inverse, les clients en classe économique n’avaient rien à faire (une fois assis à leur place, personne ne s’occupait d’eux). De plus, bon nombre n’ayant pas l’habitude de voyager et ne connaissant pas les problèmes de régulation au niveau d’un aéroport, craignaient que, si le temps d’attente se prolongeait,  cela voulait dire qu’un problème était apparu sur l’avion. D’où stress.
  • Le personnel était lui très occupé pendant cette phase-là : il devait vérifier le remplissage de l’avion, contrôler les fermetures des casiers à bagages, procéder à des séries d’actions liées à la sécurité. Pour lui, ce temps d’attente était d’abord un temps de travail. Par ailleurs, étant bien évidemment des voyageurs fréquents, ils avaient l’habitude de ces temps d’attente.
La mise en évidence de ces décalages a conduit la compagnie aérienne à faire évoluer la séquence des services pour la classe économique et à modifier l’attitude du personnel de bord pour les rendre plus attentifs aux préoccupations réelles des passagers.
Demain, je poursuivrai avec deux exemples issus d’une entreprise industrielle…
(à suivre)

7 juin 2011

POURQUOI LE MIROIR CLIENT EST UN OUTIL EFFICACE

Le Miroir Client, un outil simple pour matérialiser les écarts entre entreprise et client (2)
Il peut être rapidement mis en œuvre par l’entreprise elle-même, et être déployé partout
Une fois passée la phase initiale de mise au point du questionnaire et de la mise en forme des résultats, et de la formation d’une équipe interne, la démarche Miroir Client peut être réalisée sans l’appui de ressources externes, dans toutes les composantes de l’entreprise.
… et c’est donc un outil d’autodiagnostic décentralisé
Le questionnaire étant administré localement, chaque équipe – il ne faut en aucun cas en faire un outil d’évaluation individuelle – est mise face à la situation telle qu’elle est pour elle, et non pas de la moyenne de l’entreprise. L’expérience montre qu’il est alors – sauf de rares exceptions –, inutile d’argumenter longuement sur les actions à entreprendre. La seule matérialisation des écarts entre ce que l’équipe pensait et ce que le client pensait vraiment va déclencher un changement des comportements.
C’est une démarche consolidante…
Pour la plupart des items, l’écart entre les points de vue est faible. En effet, si ce n’était pas le cas, l’entreprise serait complètement décalée par rapport aux attentes du client, et serait donc déjà sortie de son marché(1). Ce fait, à chaque démontré, qu’à environ 80/90%, il y a adéquation favorise l’adhésion à la démarche et consolide les équipes.
… qui permet d’optimiser les efforts et les allocations de ressources
Le Miroir Client met en relief à la fois les cas où l’entreprise sous-investit sur un sujet (soit en sous-estimant l’importance de l’item, soit en surestimant la satisfaction du client, soit cas le pire, les deux à la fois) ou surinvestit (pour des raisons symétriques). Comme le Miroir Client est déployé localement, cette optimisation est fine et précise, et n’est pas imposée par le centre, ni par des visions moyennes.
Les illustrations de cet article sont tirées de cas réels (2).
Cette démarche peut être réalisée pour toute entreprise, quel que soit son domaine d’activités, grand public ou industriel. Le questionnaire est simplement évidemment très différent, et son mode d’administration aussi. Notamment en milieu industriel, comme le client est lui-même une entreprise, et donc une organisation complexe, il faut chercher à administrer le questionnaire à l’intérieur de l’organisation du client.
Demain, je donnerai des anecdotes issues de démarches réalisées…
(à suivre)
(1) Dans une telle situation, une démarche de type Miroir Client est inappropriée. L’entreprise a besoin de se reconstruire en profondeur.
(2) Si vous cliquez dessus vous aurez l’image agrandie et donc plus lisible

6 juin 2011

COMMENT METTRE L’ENTREPRISE FACE À CE QU’ELLE PENSE ET CROIT

Le Miroir Client un outil simple pour matérialiser les écarts entre entreprise et client (1)
Lors de mes derniers articles, j’ai insisté sur la difficulté de l’observation, et notamment du risque de voir l’entreprise développer un point de vue différent de celui du client (1), risque qui, paradoxalement, peut croître avec l’expertise interne de l’entreprise.
Comment peut-on agir ? Y a-t-il un outil simple dont toute entreprise pourrait se doter ?
La réponse que j’ai développée et  qui a été déjà mise en œuvre de multiples fois, et dans de grandes organisations, est le Miroir Client.
Avant de vous présenter de quoi il s’agit, je précise que cet outil n’a pas la prétention de résoudre à lui seul la totalité du problème posé, mais il a montré qu’il était un excellent déclencheur et permettait des progrès significatifs.
L’idée Miroir Client est née de la remarque suivante : ce qui détermine les actions de chacun, ce ne sont pas les priorités clients réelles, mais les priorités clients telles que vues et interprétées par l’organisation et son personnel ; s’il y a un décalage entre ce qu’attend le client et ce que croit l’entreprise qu’il attend, le centrage des actions sera inefficace. Il y a donc un intérêt à mettre en regard, comme par un effet miroir, ce que l’entreprise croit que le client pense et ce qu’il pense vraiment.
Quel est le principe du Miroir Client ? Il est de mettre en relief les décalages éventuels entre ce que pensent les clients et ce que l’entreprise croit que les clients pensent. 
Comment ?
  • Par l’élaboration d’un questionnaire partant du parcours client et, pour chaque item, demandant quel est son importance et quel est le degré de satisfaction,
  • Par l’administration de ce questionnaire d’abord à l’ensemble du personnel de l’entreprise (ou à un échantillon si l’entreprise est de grande taille), puis à un échantillon des clients. Au personnel, on demande d’indiquer non pas son opinion personnelle face à une question donnée, mais ce qu’il pense que sera la réponse du client.
  • Par, ensuite, la mise en forme des résultats sous forme très visuelle matérialisant les écarts ou les similitudes (voir la photo ci-jointe)
  • Par l’animation de la restitution, amenant des représentants de l’entreprise à auto-analyser les tableaux, et en veillant qu’ils n’esquivent pas les problèmes.
Est-ce que cela marche vraiment ? La réponse est oui ….
(à suivre)

24 mai 2011

ATTENTION À NE PAS INTERDIRE LA COMPRÉHENSION EN DÉCOMPOSANT UN PROBLÈME

La musique est-elle seulement une succession de notes ?
« Bien, par quoi commence-t-on ? », « Comment avez-vous décomposé le problème ? », « Je propose que l’on se répartisse le travail : nous allons former trois équipes et éclater le sujet en trois. Puis nous ferons la synthèse, cela ira plus vite ainsi », …
Certes, il paraît souvent logique et efficace de décomposer un problème en sous-ensembles, sauf que, dans ce cas, on risque de précisément « décomposer » le problème, c’est-à-dire faire rendre impossible sa compréhension.
En effet tout découpage repose sur une vue de la situation et une grille d’analyse a priori. Comment savoir si elle est pertinente ? Ne va-t-elle pas biaiser la compréhension et l’analyse ? Et si le problème est justement dans une des lignes de partage de cette partition…
Face à une situation complexe, il faut s’interdire de la décomposer ainsi à l’avance, et il faut l’appréhender globalement, et comprendre que :
  • Comme une analyse ne peut se faire qu’à partir de découpages implicites ou explicites (ne serait-ce que pour des raisons temporelles ou spatiales), il faut continûment procéder à des regroupements et être vigilant concernant les effets de bord ou de frontière, générés par le découpage.
  •  Même si un découpage est pertinent et exact, le tout n’est pas la seule réunion des parties qui le composent : une main n’est pas qu’un assemblage de cellules, un corps un assemblage d’organes ou une société une réunion d’individus. Le passage à un niveau supérieur fait émerger une nouvelle entité avec ses propres règles, systèmes, et donc dysfonctionnements potentiels. Il faut donc expliciter ces règles de fonctionnement qui font que le système étudié existe bien en tant que tel comme un ensemble.
Pour illustrer ce point sur les dangers et les limites d’une approche par les sous-ensembles, voici un texte tiré du livre d’Henri Atlan, À tort et a raison :            
« On voit mal comment des interactions neuronales pourraient être considérées comme responsables d'un crime ou d'un bienfait, apprécié comme tel et jugé par d'autres interactions neuronales. À l'autre extrême, si un observateur extérieur observe le comportement d'un réseau d’automates probabilistes avec auto-organisation fonctionnelle sans en connaître la structure, il sera tenté de lui attribuer une intentionnalité... Et pourtant nous n’attribuons pas une intention à ce comportement finalisé... »
Une autre forme de découpage est la transformation d’un flux en photographies instantanées : alors que toute situation est en mouvement et en évolution, lors d’une analyse, on fige souvent une situation. Attention à ne pas oublier de « penser le mouvement ».
Sur ce thème, voici ce que disait Henri Bergson dans une conférence(1) :
« Écoutons une mélodie en nous laissant bercer par elle : n'avons-nous pas la perception nette d'un mouvement qui n'est pas attaché à un mobile, d'un changement sans que rien qui change ? Ce changement se suffit, il est la chose même… Sans doute nous avons une tendance à la diviser et à nous représenter, au lieu de la continuité ininterrompue de la mélodie, la juxtaposition de notes distinctes (…) parce que notre perception auditive a pris l'habitude de s'imprégner d'images visuelles … Faisons abstraction de ces images spatiales : il reste le changement pur, se suffisant à lui-même, nullement divisé, nullement attaché à une "chose" qui change. »

(1) Leçon sur la perception du changement de Henri Bergson par Jean Ricot

12 mai 2011

FAUT-IL PESER LA PEINTURE POUR ANALYSER UN TABLEAU ?

Comment faire un diagnostic complexe ?
L’équipe scientifique était en place et avait un double défi à relever : analyser un tableau de Van Gogh et une symphonie de Mozart.
Quelques heures plus tard, ils avaient terminé leur travail et purent nous délivrer les faits capables de tout savoir sur ces œuvres.
Concernant le tableau de Van Gogh :
  • L’analyse aux rayons X avait permis de donner toutes les caractéristiques de la toile utilisée. L’équipe avait ensuite, sur la base de ces éléments, reconstitué un morceau virtuel qui avait été joint au dossier.
  • Une étude chromatique fine avait montré que le peintre avait utilisé vingt-deux tubes différents. La quantité prise dans chaque tube avait aussi été précisée. On attendait les résultats d’une étude complémentaire pour connaître la date exacte de fabrication de chaque tube. Pour l’instant, elle n’était estimée qu’à cinq ans près.
  •  L’ordre dans lequel avaient été déposées les différentes couleurs, avait été reconstitué.
  • Le mouvement précis du pinceau restait lui inconnu. Le professeur chargé de l’évaluation demanda pourquoi cette lacune. Il ne fut pas satisfait par la réponse donnée.
  • Le temps de séchage de la peinture, ainsi que le comportement du vernis dans le temps avaient été modélisés.


Concernant la symphonie de Mozart :
  • Pour chaque instrument, a été précisé combien de temps il est utilisé. Cet élément a été introduit dans la base de données des fabricants, pour préciser le risque d’avoir une rupture à l’occasion d’une symphonie, ainsi que la fréquence recommandée pour les révisions pour des instruments qui ne joueraient que cette symphonie.
  • La quantité de décibels a été calculée tant en moyenne qu’en pointe. Pour cela, ont été modélisées plusieurs salles de concert, ainsi que plusieurs positions dans la salle.
  • Les fréquences émises ont été analysées, en tenant compte du temps d’émission et de la puissance du son émis. Un calcul statistique et la mise en œuvre de techniques de recherche opérationnelle mathématique sophistiquées ont permis de trouver toutes les corrélations entre fréquences, ainsi que le calcul de toutes les moyennes et écarts-types.

A l’issue de la présentation de ces résultats, une personne qui avait assisté sans avoir été invité, émit un jugement très critique sur ces deux analyses, en prétextant que l’équipe avait oublié de parler de la peinture de Van Gogh et la musique de Mozart. Elle n’avait visiblement pas été sensible à la pertinence de ce travail scientifique qui, pourtant, avait effectivement réunis tous les faits composant cette peinture et cette musique.
Cette anecdote, évidemment totalement imaginaire, ne vous rappelle-t-elle pas pourtant certains approches faites dans des diagnostics ?
Et si pour comprendre un tableau ou une symphonie, il fallait surtout le regarder ou l’écouter attentivement en faisant le vide ? Mais comment que veut dire développer l’attention et faire le vide ?
C’est ce sur quoi je reviendrai à partir de lundi prochain…